Extension d'audience : bon pour les retailers et les publishers, pas toujours pour les marques

Extension d'audience : bon pour les retailers et les publishers, pas toujours pour les marques Ces offres peuvent s'avérer intéressantes pour des besoins de branding, mais leur coût élevé et leur reach limité doivent être mis sur la balance.

Les adtech et les régies se mettent au pas de course pour renforcer les dispositifs d'extension d'audience des retailers. Les exemples se multiplient : TF1 Pub avec Infinity Advertising (Casino et Intermarché), M6 ou France TV avec Unlimitail (Carrefour et Publicis), Equativ avec Valiuz et Cdiscount, Pubmatic qui communique sur son offre Convert… Ces partenariats consistent à permettre aux annonceurs d'afficher leurs campagnes aux audiences des retailers mais en dehors de leurs sites, sur le web. Une tactique alléchante pour tenter de renforcer la notoriété de la marque auprès de la bonne cible ou tout simplement pour recibler un consommateur ayant abandonné son panier.

Certes ces dispositifs sont encore timides en France en volume (on y consacrerait moins de 10% des budgets programmatiques en retail media). Mais ils représentent pour les régies et leurs prestataires adtech une source supplémentaire de revenus potentiels, et notamment de budgets branding. D'autant que l'inventaire des retailers (hors Amazon) est limité. Mais est-ce vraiment une bonne option pour les annonceurs ?

Car sur le papier, cela paraît magique pour un annonceur de pouvoir afficher sa campagne à une audience de consommateurs segmentés selon leur historique d'achat et consentant à la publicité personnalisée, et ce même dans une logique de sensibilisation à la marque. D'autant que cela coûte beaucoup moins cher que d'afficher la publicité sur le site du retailer, de deux à quatre fois moins selon le format et l'emplacement. C'est aussi en théorie un moyen pour l'annonceur de retoucher un prospect en phase de considération d'achat.

Mais en pratique, l'extension d'audience en retail media n'est pas toujours une alternative intéressante pour les annonceurs. Son coût élevé (comparé au display et à la vidéo sur l'open web ou les plateformes) et son reach limité doivent être mis sur la balance avant toute prise de décision. Des experts voulant rester anonymes nous ont expliqué que les marques ont souvent du mal à justifier le recours à la data retail pour les campagnes de branding. La raison est que la data sociodémographique classique disponible sur l'open web, beaucoup moins chère que la data retail, fournit souvent des résultats satisfaisants pour les marques qui disposeront de beaucoup de volume, en partie pour répondre aux logiques de notoriété. "De grandes marques alimentaires aujourd'hui préfèrent activer des campagnes d'extension d'audience classiques à bas coût sur YouTube ou DV 360 pour nourrir leur visibilité, faire beaucoup de notoriété et multiplier les touch points. Ces marques ne choisissent pas l'extension d'audience en retail media dans ce cas", explique un expert préférant rester anonyme. Ces marques ne cherchent en effet pas non plus dans ces cas à mesurer l'impact de ces types de campagnes sur les ventes.

Cela ne signifie pas que l'extension d'audience n'a pas d'intérêt : son impact est mesuré et démontré quand cette tactique est par exemple combinée à de l'achat onsite. "L'extension d'audience en retail media peut apporter des résultats, notamment pour toucher des segments précis d'audience. De plus, la marque peut connaître l'impact de sa campagne sur ses ventes grâce à la data retail. Mais ce levier doit être employé en complément d'autres leviers, jamais seul", explique Christophe Le Marchand, directeur général de CoSpirit Commerce. "Tout l'intérêt de l'extension d'audience en retail media pour les marques est de leur permettre de relier leurs stratégies de haut et de bas de funnel, de maîtriser tout le processus de conversion, de l'exposition à la pub jusqu'à l'achat. Mais pour que cela puisse fonctionner il faut que les retailers soient disposés à partager un maximum d'informations granulaires, ce qui n'est pas toujours le cas", commente Charles Deffontaine, CEO de Trygr.

La data justement : un autre argument en faveur du retail media souvent employé pour l'extension d'audience est la qualité de la data déterministe, qui n'est pas dépendante des cookies tiers dont les jours sont comptés. Sauf que cela est vrai pour l'activation onsite, chez les retailers, mais pas pour l'extension d'audience, levier qui reste dépendant lui aussi des cookies tiers. "La donnée retailer activée en extension d'audience sera toujours reconnue comme une data 3r party par les navigateurs. Elle sera par conséquent impactée par la suppression des cookies tiers sur Chrome au même titre que l'open web", explique Arick Abbou, directeur associé chez iProspect (Dentsu).

C'est pourquoi les régies de retail media ont elles aussi tout intérêt à se rapprocher des solutions alternatives aux cookies tiers. Ce n'est certainement pas un hasard si la régie de Valiuz a conclu en décembre dernier un partenariat avec Liveramp, fournisseur de l'identifiant RampID lui-même interopérable avec l'EUID de The Trade Desk. Même chose pour Amazon Ads, qui s'est intégré à Liveramp.